L'EXPLORATION
DE LA GROTTE DE THAÏS

LA CONSTRUCTION DE NOS PLATE-FORMES
- 1970 -


Par Denis Lorain


Pendant toutes ces années, on ne venait qu'hors saisons, automne et hiver, quand l'époque touristique était terminée et la grotte fermée au public. La municipalité de Saint Nazaire-en-Royans était intéressée par nos travaux dans la grotte de THAÏS. Elle aussi voulait comprendre comment continue cette grotte, après ce départ de siphon et essayer de savoir d'ou viennent ces m 3 d'eau qui se déversent dans la Bourne. Pendant ces années, nous faisions une présentation des topographies que nous avions faites et, aussi, une présentation de notre matériel de plongée. On éditait de petites affichettes que nous scotchions chez les commerçants de St Nazaire. La municipalité nous prêtait une salle de classe, dans une école. Ça ce savait et on faisait cela un samedi soir. Les gens venaient nous voir pour un exposé de 2 ou 3 heures. Au tableau noir, nous fixions des documents élaborés par nos soins pour bien montrer la configuration du coté inconnu de cette grotte. C'est souvent Marcel qui prenait la parole pour commenter nos planches explicatives. Notre petit public était ravi de découvrir se qu'il ne pourrait, sans doute, jamais aller voir ! Ensuite, il s'approchait de nos tables où on exposait le plus de matériel possible : nos scaphandres, nos téléphones, tout notre matériel de signalisation y était, dérouleurs et compagnie ! Même nos casques spéléologiques, nos baudriers, nos cordes et nos échelles souples en acier. Bref, les gens était très intéressés et, après avoir osé s'approcher, on passait un bon moment. Les questions fusaient de toutes parts. Vraiment sympa pour ces personnes qui ne pourraient nous voir pendant nos expéditions ! Ici on pouvait parler et montrer ce que nous faisions au cours de ces plongées, extrêmes parfois. Ils étaient vraiment intéressés, un vrai bonheur pour nous ! D'autant plus qu'ils apprenaient comment c'était, sous la terre, dans cette grotte dont ils ne connaissaient que le coté touristique !

Ce sont des articles qui paraissaient dans les journaux, non seulement sur nos explorations, mais aussi, le travail d'autres équipes qui exploraient d'autres grottes. C'est juste pour montrer que nous n'étions pas seuls et isolés dans notre coin !! En fait, on connaissait des groupes Français, bien sur, mais aussi, beaucoup d'autres qui venaient des pays autour de France : Espagnols, Allemands, Belges, Suisses, Italiens et j'en passe ! Dans nos mensuels des fédérations, où, nous même, nous éditions l'avancée de nos explorations, il y avait aussi ce que l'on appelle : des prises de dates. Ce qui voulait simplement dire, de la part d'un groupe « nous travaillons sur ce site » Ainsi, personne n'allait embêter personne ! On savait tous où chaque groupe se trouvait et on connaissait l'avancée des explorations de chacun ! Ceci se passe, souvent, sur plusieurs années et si nous n'étions pas loin d'une équipe, que l'on savait dans les environs, on allait les voir. C'était toujours sympa. Et eux aussi venaient, parfois, nous voir. Peut importe la nationalité, on arrivait toujours à ce comprendre !

La configuration de THAÏS derrière siphon, bien sûr, est simple quand on la connaît.

1er siphon, 50 à 60 mètres en distance, profondeur moyenne 10 mètres. Ensuite, dans notre jargon, une salle en cloche. En fait on débouche du siphon et on se retrouve dans un petit lac souterrain. C'est là qu'est la première plate-forme, construite par les copains. Je n'étais pas encore au GRPS !! On peut comprendre l'utilité de cette base logistique. Ici, on aborde le 2 ème siphon, mais deux passages sont possibles, un à 8 mètres et l'autre à 19 mètres de profondeur. Cette salle en cloche et ce lac ne sont pas vraiment très grands. La voûte rocheuse se trouve à environ 5 mètres au-dessus de nous et ce petit lac souterrain fait tout juste une dizaine de mètre dans ses dimensions les plus importantes. D'ou l'utilité d'une base de départ, sûre, pour continuer.

Le 2 ème siphon est relativement court aussi, 40 à 50 mètres. Nous l'avons abordé, soit aux 8 mètres, soit au 19 mètres. Sorti de là, c'est la rivière souterraine sur, environ, 100 mètres. Comme toujours, à ce moment là, on a débouché, on est plus en siphon, mais en surface, sur cette rivière. La voûte nous domine parfois à plus de 10 mètres de haut.

Largeur moyenne de cet endroit, entre 2 et 5 mètres. Jamais nous n'avions pied, pour explorer le 3 ème siphon qui se présentait. Après quelques approches, vite fait pour voir, nous avons construit une 2 ème plate-forme. Il nous fallait une base solide pour continuer et explorer le 3 ème siphon. A partir de cette 2 ème plate-forme, nous avons pu passer, un 4 ème siphon. Tout ce faisait à partir de cette plate-forme, car, bien que le siphon soit difficile à passer, avec notre grand dérouleur de 300 mètres de fil d'Ariane, nous arrivions à progresser assez loin. Bien sûr ce n'était pas simple. Un labyrinthe de galeries qu'il fallait explorer systématiquement pour trouver des solutions. Nous avons pu passer un 5 ème siphon, Mais ce dernier franchi, nouvelle poche d'air et encore une courte rivière souterraine. Nous avons fait la rencontre de l'entrée d'un 6 ème siphon. Comme je l'ai déjà expliqué, ceci sur passe sur plusieurs années. Nous nous sommes vite rendu compte, en faisant des reconnaissances rapides, que l'exploration de ce 6 ème siphon nécessitait encore une base logistique sûr. Nous avons donc construit une 3ème plate-forme. Voilà pour le principal de la configuration de THAÏS.

Une vue de la rivière souterraine, juste après le 2 ème siphon. Ici nous construirons notre 2 ème plate-forme, base essentielle pour continuer dans de bonnes conditions de sécurité. Pour cette nouvelle plate-forme, nous choisirons, bien sûr, l'endroit le moins large de la rivière, et le plus proche possible du 3 ème siphon.

Ici, la première plate-forme, juste après avoir débouché du 1 er siphon. Nous sommes dans la salle en cloche. La plate-forme n'est pas terminée, nous agrandirons le plancher et en feront un autre, un peu plus bas, pour se tenir debout. Le petit bateau gonflable, que l'on aperçoit, nous servait à entreposer du matériel, tel que des outils, scaphandres de secours, etc… Sous les eaux de ce petit lac, un passage à 8 mètres et l'autre, à 19 mètres de profondeur, nous permettant d'entrer dans la diaclase du 2 ème siphon et ensuite, la rivière souterraine que l'on voit sur la photo précédente.

Le croquis de la page suivante, une installation qui nous permettait d'atteindre notre téléphone de la 1 ère plate-forme. Cette une installation que nous avions imaginé et réalisé. C'est un peu archaïque, mais très efficace. Une poulie fixée sur la roche en hauteur, un contre-poids pour tenir le combiné, lui aussi en hauteur et une corde de traction pour faire descendre le combiné téléphonique à soit. Cette petite invention avait deux avantages. D'une part, en cas de crues, de montée des eaux, le combiné ne serait pas noyé, étant hors de portée de l'eau. Il faut savoir qu'en période de crue, nous avions près de 20 centimètres d'eau sur cette plate-forme ! L'autre avantage, quand on arrivait ici, il nous suffisait de tirer sur la corde et de faire descendre le combiné jusqu'à nous. Ça évitait à un plongeur de grimper sur la plate-forme pour communiquer avec l'équipe de soutien restée en arrière ! En relâchant la corde doucement, le contre poids, (2kg), ré entraînait le combiné vers le haut, à l'abris des montées des eaux ! Tout était parfait avec ce petit système très simple, mais tellement pratique !

PREPARATION DE NOTRE 2 ème PLATE-FORME

Cette préparation nous a obligé à une expédition de reconnaissance approfondie préliminaire. Nous sommes en décembre 1972. Nous étions six : Daniel, Mickey, Bob, « Pépé » Yves, Henri P. et moi. Nous passons deux par deux jusqu'à la 1 ère plate-forme. But de cette expédition, tirer un câble téléphone de cette première plate-forme, passer le 2 ème siphon et fixer ce câble avec un combiné, assez haut au dessus du niveau de la rivière souterraine. Nous nous y mettons à quatre, car nous n'avons pas pieds ici. Les uns tiennent les outils et les passent aux deux qui s'occupent de fixer un « spit » dans la roche. Henri P. s'occupe de faire le trou dans la roche, tandis que je le soutiens comme je peux pour qu'il puisse travailler le plus haut possible. Pépé et Daniel nous assistent en nous passant le matériel. IL y à pas mal de débit dans THAÏS à cette époque de l'année, donc pas mal de courant dans cette rivière. Mais c'est supportable. Ce travail étant fait, nous communiquons avec Bob et Mickey, restés en attente sur la 1 ère plate-forme. Ce que nous venons de faire est un travail provisoire, pour l'instant, et la liaison téléphone fonctionne bien. Retour sur la plate-forme pour tous. Un peu crevant tout ça !! Un peu de repos et nous repartons Henri et moi, avec notre système « topofil ». C'est surtout la tablette pour écrire qui nous intéresse, pour prendre des notes, ici tout est déjà topographié ! Nous partons aussi avec un cinq mètres à ruban. Daniel et Mickey font retour à travers le 1 er siphon pour rejoindre l'équipe de soutient dans la grotte. Sur la plate-forme restent Bob et Pépé. Henri et moi repassons, à nouveau le 2 ème siphon et parcourons la rivière jusqu'au bout, là ou nous avions fixé le combiné téléphonique. Le but de la manœuvre : prendre note, le plus exactement possible, des dimensions de la rivière, là où nous avions repéré des endroits, dans la roche, où nous pourrions faire tenir notre 2 ème plate-forme. De petites cavités de part et d'autre des parois. Ceci étant fait, c'est le retour pour tout le monde et notre rentrée sur Lyon !

Pour construire notre 2 ème plate-forme, nous avions acheté tout le matériel pour la réaliser. Pour cela, nous avons réalisés deux charges, deux gros colis !! L'un pesait 80kg et l'autre 120kg. Bien sur, pas question d'emmener ces charges telles qu'elles, dans les siphons. Nous nous sommes retrouvés dans les eaux de Miribel Jonnage, près de Lyon,

ceci pour équilibrer nos « colis ». Nous avons « ligotés » nos paquets de tubes, de vérins de maçons, nos planches. Sur chaque paquets, nous

fixions de grands morceaux de polystyrène, jusqu'à ce que nos charges flottent comme des bouchons et ne pèsent plus rien dans l'eau. Même 120kg peuvent êtres remués avec le petit doigt dans ses conditions ! N'empêche, il faut tout de même les convoyer à travers THAÏS, avant d'arriver au 1 er siphon. Là, il y a une autre difficulté, il faut descendre une échelle de « perroquet » pour atteindre l'eau. Pas marrant avec nos « colis » !!

LES PREPARATIFS


Henri P. et Henri B., nos deux Henri en plein travail !

Sur la photo à gauche, je suis à gauche. Daniel est en face de moi. On va procéder à cette opération un peu longue et délicate d'équilibrage !

Quelques jours plus tard à THAÏS. Les charges sont misent à l'eau.

Denis et daniel à léquilibrage .
C'est parti, Daniel est à gauche, cette fois, je suis en face. Nous taillons les morceaux de polystyrène. Ce sera long !

Daniel, en plein travail !

Ici, nous avons passé le 2 ème siphon et l'on se trouve dans la rivière souterraine. Bientôt nous serons arrivé vers l'endroit que nous avions repéré, près du départ de 3 ème siphon. Pour passer nos charges dans le 2 ème siphon, nous avons choisi le passage au 19 mètres de profondeur. Celui qui se trouve aux 8 mètres était un peu trop étroit pour passer ces grand colis !

Ici, toute la journée, nous avons fait des aller-retour, pour le transport de nos sacs de matériel pour construire cette plate-forme.

Le tout a été déposé dans le fond de la rivière, par 2 mètres, 2,50 mètres de fond. Bien qu'il y ait un débit important et un courant conséquent, tout ce matériel était lourd. IL faut savoir que nous avions retiré le polystyrène, pour que les charges retrouve leur poids réel de 80 et 120kg. Elles ne risquaient pas de se sauver et, de plus, elles retenaient nos sacs de matériel. On reviendrait le lendemain pour faire le travail, on était crevé !! On a, bien sûr, récupéré le polystyrène pour ne pas polluer THAÏS !!

LA CONSTRUCTION

Nous avions préfabriqué notre plate-forme, au sol, au bord des eaux de Miribel-Jonnage, coupé les planches aux dimensions voulues, avant d'équilibrer toute cette quincaillerie.

Après le passage de tout notre matériel, dans des conditions difficiles, les sacs et surtout nos colis de tubes d'échafaudages et vérins de maçonneries, plus les planches, dans THAÏS, le lendemain nous étions six à partir. Passage du 1 er siphon et arrivée vers la 1 ère plate-forme. Ici vont rester en attente et en liaison avec l'extérieur deux copains : c'était Mickey et un autre Daniel D., qui plongeait parfois avec nous. Les deux sont restés des heures sur cette 1 ère plate-forme. Ils avaient pris la précaution d'amener un jeu de 421 ! Ils avaient bien fait car, dans la suite, tout ne se s'est pas aussi bien passé que prévu ! Comme souvent, cela ne va pas comme on veut et nous étions, tout de même, dans un endroit un peu hostile !

C'est encore plus loin, après la faille que l'on voit devant nous, que nous allons construire notre plate-forme, très près du départ du 3 ème siphon.

Nous avons laissé Mickey et Daniel D. sur la plate-forme du 1 er siphon et sommes partis tous les quatre : Pépé, Henri P., Daniel B. et moi. Nous retrouvons rapidement nos « colis » et nos sacs de matériel au fond de la rivière. Il y a du courant, bon débit en m 3 seconde, mais ça va, cela ne nous gêne pas trop !
Arrivé sur les lieux, nous tentons une liaison avec le combiné installé quelques jours avant. On voulait juste parler un peu avec Mickey et Daniel D.  Comme par hasard, ça ne fonctionne pas, ça commençais mal, mais pas de problème. THAÏS était en période de crue, mais on ne risquait rien ici. On voulait juste donner de nos nouvelles !!

Oubliant momentanément la panne de ce combiné, on s'est mis au travail tous les quatre. On oeuvrait tous les quatre dans le fond de la rivière souterraine, en maniant clefs à griffes, clefs à molettes, pinces coupantes et marteaux que nous avions sortis de nos sacs. Rien n'était facile, on devait sangler nos sacs vides sur quelque chose de lourd pour qu'ils ne partent pas dans le courant. Nous travaillons sans relâche, avec pour seul bruit, celui de nos détendeurs et de nos bulles d'air et pour seule conversation, les signes que nous nous faisions ! Nous soulevions d'énormes nuages de sables et de glaises. Cela voilait notre vue quelques instants, mais le courant nettoyait rapidement notre environnement. Nous n'avons mis pas moins de 30 minutes pour démonter le premier paquet de tubes et de planches et bloquer ce qui risquait de partir avec le courant. Puis il a fallu entreprendre de poser le premier vérin entre les parois rocheuses, distantes, d'entre elles, de deux mètres. On était obligés de le poser au ras du niveau de l'eau et on s'est mis deux par deux, l'un éclairant l'autre. Je le rappelle, nous n'avions pas pied, qu'il y avait du courant et que nous avions pris le soin d'amener nos tuba pour respirer en surface, ce qui ne ce fait pas en siphon, en raison des risques d'accrochages dans les rochers.

Le démontage de la première « charge » venait d'être relativement pénible et nous avions consommés pas mal d'air sur nos scaphandres.

Pourquoi nous n'arrivions pas à serrer le premier vérin entre les parois ? Nous l'avons compris plus tard en y repensant. Toujours est-il que rien n'allait dans le moment présent. Lorsqu'il était en place d'un coté, il basculait de l'autre coté! Nous essayons de le bloquer entre les parois, mais le courant nous plaçait dans une mauvaise position et le vérin nous avait échappé et il fallait retourner le chercher au fond. Tout allait mal. Je soufflais comme un bœuf et mes copains aussi. Il fallait se remettre en place après avoir récupéré ce vérin. Nous pensions qu'il tenait bien et dès que nous l'agrippions pour se reposer un peu, tout retombait et il fallait tout recommencer. Un vrai paradoxe, nous étions obligés de respirer sur nos scaphandres au lieu d'utiliser nos tubas, pour reprendre notre souffle ! Je me souviens aussi du moment où je m'était agrippé à des excroissances rocheuses pour calmer ma soif d'air, sans utiliser mon scaphandre, car il fallait penser au retour au travers des deux siphons. Nous avons du nous débattre une bonne heure avant que ce sacré vérin ne soit solidement serré et ancré entre les parois de roches. Cette fois c'était bon, ça tenait bien. On s'est suspendus tout les quatre sur ce vérin, la tête hors de l'eau et, en silence, on reprenait notre haleine ! Seule la lueur blafarde d'un phare qui commençait à en avoir marre, nous éclairait. On économisait le reste de la lumière pour rentrer !!

« Bon ça va mieux, dit Daniel

- Ca a l'air, ouf ! je répondais

•  On va bien serrer ce putain, de vérin pour être sûr qu'il va bien tenir, rouscaillait Pépé ! »

C'est ce qu'on à fait et nous avons testé le bon ancrage de cette première pièce de notre plate-forme, en secouant et se suspendant avec violence, sur ce truc. On en avait marre de ce machin, il nous avait fait souffrir !

A partir de ce moment là tout est devenu plus simple. Le deuxième vérin a été très rapidement mis en place deux mètres plus loin. On le serrait entre les parois et on testait avec rage sa bonne tenue ! Bon sang, ça commençait à bien faire !!!

Les autres tubes on été très vite mis en place. Les planches on été rassemblées sur ce début de structure et Henri et moi avons commencé à les arrimer sur les tubes pour construire et pour former la première partie du plancher. Pendant ce temps, Pépé et Daniel finissaient de consolider le reste. Daniel avait un scaphandre de 3m 3 , aussi accomplissait t'il toutes les servitudes : aller chercher les outils au fond de la rivière, remonter des colliers, ou bloquer ceux-ci en plongée. On pensait tous que Daniel aurait assez d'air pour rentrer, même avec la seule réserve de son bloc. Et puis nous avions nos ventraux de secours.

LES VRAIS ENNUIS COMMENCENT POUR UN RETOUR « MERDIQUE »

Un « hic » s'est produit. Lorsque Daniel a voulu passer la réserve de son scaphandre, c'était déjà fait ! Accident ou oubli ? Toujours est t'il que sans s'en apercevoir, Daniel avait tout respiré, son scaphandre était vide, il ne lui restait plus que son ventral de secours. Faire retour, tout de suite, ou rester et finir la plate-forme ne changeait rien au problème. Nous avons donc décidé de rester et de finir notre travail. Mais il nous fallait avertir les copains restés à l'arrière. Daniel empruntait le scaphandre de Pépé, un 2 m 3 . Aujourd'hui, je ne sais pas pourquoi ce téléphone n'était pas avec nous. Probable qu'on l'avait laissé, gêné, en transportant nos charges de matériel et nos sacs. Daniel est parti le chercher, notre téléphone étanche. Il se trouvait à 30 mètres de nous, Daniel pouvait faire le parcours en surface et, un bref passage en plongée, pour le retrouver. Vraiment tout allait de travers ce jour là !! Et ce combiné que nous avions installé récemment qui ne fonctionnait pas !

(Je le réparais par la suite). Lorsque Daniel est revenu avec ce combiné téléphonique, il nous a informé que le scaphandre de Pépé était presque vide et qu'il fallait le passer sur réserve. Je revois encore Daniel tirant sur la tige de réserve et s'apercevant que, là encore, pour ce scaphandre, tout était fini ! La réserve était également déjà tirée !! Cette fois ce n'était plus la même histoire. Deux plongeurs sur quatre avaient leurs scaphandres principaux vides. Et on était derrière deux siphons… Malgré tout et, parce que cela ne changerait rien, nous avons décidé de continuer notre travail. Nous avons terminé notre plate-forme 4 heures après l'avoir commencée ! Je terminais, avec Henri de clouer les dernières planches, perpendiculaires aux premières. En fait, on terminait un deuxième plancher sur le premier pour consolider le tout. Je clouais les planches sous 30 centimètres d'eau. THAÏS était vraiment en crue et en commencent au ras du niveau de la rivière, maintenant les eaux étaient montées de 40 centimètres environ. Un jour essayez de planter des pointes sous 30 centimètres d'eau, vous verrez, c'est très drôle !! Il n'y avait aucune dangerosité pour nous ici, malgré cette crue. On avait d'autres problèmes plus cruciaux. Tous le matériel restant avait été rangé dans les sacs par Daniel et Pépé et sanglé à notre nouvelle

plate-forme pour éviter de les perdre. Ils faisaient cela rapidement, avec le peu d'air restant dans leurs ventraux ! D'autres copains viendraient chercher les sacs demain, tout en pouvant admirer notre super

plate-forme !! On avait fini Henri et moi et les derniers outils on été fourrés dans un sac. On pouvait partir mais tout allait très mal encore ! D'abord, j'étais sur la plate-forme, j'avais enlevé mes palmes du mousqueton de ma ceinture de plomb. Je n'ai pas fait attention, cela faisait plus de quatre heures que nous étions ici, un peu fatigué quand même, mais pas d'excuse !! Une palme m'a échappée et le courant de la grotte de THAÏS l'a emporté. Mon retour serait un peu plus compliqué ! Mais pas grave ! Le plus grave était le reste !!
Il fallait bien penser à ce retour, sur notre fil d'Ariane fixe.

UN RETOUR DES PLUS PROBLEMATIQUE

Les piles de nos phares de plongée donnaient, elles aussi, des signes de faiblesses. Elles étaient comme nous ! Pour commencer, on repartait Daniel et moi. Daniel était devant moi. Je savais qu'il respirait sur son ventral, très faible réserve d'air et qu'il ne fallait pas traîner en ces lieux. Malgré le courant, le siphon est assez troublé et mon phare, très fatigué, éclaire comme ceux d'une voiture dans le brouillard ! Daniel n'a qu'un seul détendeur et si ce dernier tombait en panne, mon copain ne pourrait plus que compter sur moi pour s'en sortir. Nous sommes sorties du 2 ème siphon et avons remontés le puit, pour arriver à la 1 ère plate-forme. Là nous avons retrouvés Mickey et Daniel D., qui étaient restés en relais pendant tout ce temps. Ils avaient meublé leur attente en jouant au 421 !

A partir de cet instant, que s'est-il passé au juste ? Je ne sais plus très bien.

Alors voici, en vrac, la suite des évènements. Nous attendions le retour d'Henri et Pépé, mais ils ne revenaient toujours pas. Mickey était plongeur de sécurité, sur cette 1 ère plate-forme :

«  - Dis donc, ils tardent à revenir ! disait Daniel B.

•  Je ne sais pas ce qui ce passe, ce n'est pas normal

•  Oui, presque 20 minutes qu'on attend, m'a répondu Mickey

Je lui demandais :

•  Tu vas voir, mais attention, pas plus loin que l'entrée du 2 ème siphon, dans le puits, après on verra !

•  Ok Denis, j'y vais, y'a un truc qui ne va pas là ! »

Mickey est parti pour repérer Henri et Pépé. Il faut se souvenir que Pépé avait son scaphandre principal complètement vide. Nous avons su, par la suite, que celui d'Henri ne valait guère mieux. Agrippés au tubes de la plate-forme, Daniel et moi attendions (on était pas monté sur la

plate-forme, trop crevé, on voulait rentrer). Le temps passait encore et au bout d'un long moment je décidais d'aller voir, j'étais le seul à avoir encore une quantité d'air à peu près correcte.

Je partais donc voir et je descendais dans le puit en solitaire. En commençant à m'engager dans le 2 ème siphon je ne trouvais pas Mickey qui aurait du être là ! Tout en pensant qu'il avait du s'engager un peu dans ce siphon, j'y allait et au final je l'ai franchi complètement, tout en pensant que mon air restant était bien pauvre ! Toujours pas de Mickey et encore moins d'Henri et de Pépé. Cette fois cela commençait à faire beaucoup de bizarreries ! Je me suis fait la rivière, en surface, pour rejoindre la nouvelle 2 ème plate-forme. Je commençais à en avoir marre, j'était crevé ! J'ai retrouvé Pépé, Henri et Mickey sur la plate-forme. Mickey avait transgressé la règle qui consiste à ne pas plonger seul (m'ayant obligé à le faire moi-même). Enfin j'arrivais près d'eux :

«  Comment ça va, pourquoi vous ne revenez pas ?

•  Le joint torique de mon ventral a explosé Denis ! Merde, c'est vraiment chiant aujourd'hui ! disait Pépé.

•  on n'a rien pour réparer, disait Mickey, je te passe mon ventral Yves

•  Bon ok, il faut qu'on parte d'ici, répondait « Pépé » Yves, un peu énervé. »

Cette fois on est repartis, tous à la queue leu leu sur notre fil d'Ariane fixe. Pour passer ce 2 ème siphon, on avait Pépé sur ventral, Mickey sans ventral et Henri avec un scaphandre vide et un ventral qui ne valait guère mieux ! Pépé a « pompé » toute l'air de son ventral et il n'avait plus rien en arrivant à la 1 ère plate-forme. Pour ce retour, on avait Daniel D., qui ne plonge avec nous qu'à l'occasion, il était sans ventral, donc un seul détendeur. Pépé avec un scaphandre vide et un seul détendeur, avec le ventral de Daniel D., Daniel B. sur un ventral presque vide et Henri qui terminait le retour du 1 er siphon, en apnée, n'ayant plus d'air du tout ! Pas mal comme expédition, il y a mieux heureusement ! Enfin on retrouvait notre équipe de soutien au départ de ce 1 er siphon, au fond de la grotte de THAÏS. Mais il fallait encore ressortir dehors avec nos équipements lourds à ce moment de la journée, après ce que l'on venait de vivre !!

EN CONCLUSION

Ce que relate est un rapport d'expédition que j'ai écris plus tard, pour calmer les esprits et vous allez comprendre pourquoi.
Ça a bardé au GRPS ! Nous étions revenus à Lyon après cette expédition mouvementée et c'était notre première réunion hebdomadaire, comme on le faisait pratiquement tous les jeudi soir !

Le gros sujet de cette réunion de travail était, bien sûr, la réalisation de cette 2 ème plate-forme. Tout était terminé, oui mais… A quel prix ! On dit certains.

«  Vous avez agit comme des imbéciles ! Ont dit d'autres

•  Vous auriez du revenir quand vous avez vu vos scaphandres vides !

•  Vous auriez du construire la plate-forme pendant les basses eaux !

•  Vous auriez pu faire gaffe !

•  Vous auriez du être plus prudents !

•  Vous êtes des connards ! »

Vous aurez du, vous n'auriez pas du, vous êtes ceci, vous êtes cela, etc.… Etc.… !!

Bon d'accord !!!

IL est certain que nous avons fait des erreurs, tous autant que l'on est. Tous, nous n'aurions pas du construire cette plate-forme pendant une période de crue. Dans ses conditions, nous n'aurions pas du insister, alors que nous n'avions pas pieds, avec un courant conséquent et une montée des eaux. Mais qui avait prévu que l'on passerait autant de notre temps à démonter la première charge ? Qui est-ce qui prévoyait que la pose du premier vérin soit aussi difficile ?

Et puis une fois que l'on a commencé, on se dit qu'il n'y en a plus pour longtemps à finir. Des scaphandres étaient vides, mais cela ne changeait rien de revenir plus tôt, cela n'allait pas les remplir !!

Un 3 m3 n'était pas gonflé normalement dès le départ. C'est une faute personnelle ? Peut être, mais le groupe n'aurait t'il pas du l'empêcher de partir ?

Des réserves étaient tirées sans qu'on le sache. Peut être des oublis ? Des copains affirment qu'il n'en était rien, que c'était accidentel ! C'est possible…

Et puis on était accoutumé au réseau de THAÏS. On le connaissait bien ce réseau et on se permettait, ici, des choses que l'on n'aurait pas faites ailleurs ! Tenez, un exemple, un jour les copains du camp de base se sont « amusés » à bloquer le câble, pendant que les autres plongeaient dans le puit. Parce que cela faisait trop longtemps, à leurs goûts, qu'ils étaient engagés et puis, c'était tellement amusant de faire cette farce aux copains !

Tout ceci pour dire qu'après la construction de cette plate-forme, beaucoup de cris ont été poussé ! Le groupe était partagé en deux camps : ceux qui étaient resté dehors, ceux qui avaient construis ! On peu définir les choses ainsi : les premiers avaient eu peur pour nous, quand à nous…
Evidement ça avait « merdé », surtout vers la fin et au retour:

  • obligé de plonger seul pour retrouver les copains !
  • le retour de plongeurs pratiquement, voir même sans air !
  • plus de sécurité, parce que plus de détendeurs de secours (et on ne s'amuse pas trop avec ça en siphon !)
  • moi avec une seule palme !
  • des phares en train de rendre l'âme, donc presque plus de lumière pour revenir !

C'est vrai, cela faisait bien des sources de dangers. Mais nous, nous n'avons pas eu peur, on était dans le coup !! On pensait s'être très bien débrouillés, vu les circonstances et on ne comprenait pas ce que l'on prenait pour des reproches injustifiés, d'où la crise interne du GRPS !!

EN FIN DE COMPTE

La polémique a été rude au groupe. A propos de tout, à propos de rien !

C'est dommage. Pour ce qui est de cette construction, il y a eu des erreurs, mais c'est la faute à personne, c'est la faute à tout le monde, c'est la faute à ce que nous faisions ! Si on avait pu trouver chez un libraire un manuel traitant de la construction de plate-forme en siphon, il est certain que l'on s'y serait pris autrement !

Et puis qu'est-ce que je raconte là ? Cette plate-forme, ça c'est bien passé dans le fond. On a eu des problèmes, d'accord. On a eu des imprévus emmerdants, c'est vrai aussi. Mais, après tout, cela fait partie des risques de nos activités. Si l'on ne veut pas essuyer ce genre d'ennuis, il faut faire autre chose ! On peut jouer au ping-pong ! Ou bien rester à la maison sur son divan, devant la télé !

Quoi qu'on ne sait jamais, le plafond de la maison peu très bien nous tomber sur la tête !

AU FINAL

Cette 2 ème plate-forme nous a servi comme bonne base sécurisante pour continuer l'exploration de THAÏS. Nous avons pu passer le 3 ème siphon, puis un 4 ème , un 5 ème , pour se retrouver devant le départ d'un 6 ème siphon. Trois ans plus tard, nous construisons une 3 ème plate-forme, pour pouvoir continuer. Devant ce 6 ème siphon, c'était la même configuration que devant le 3 ème . Un bout de rivière souterraine et presque pas pied ! Nous avons refait les mêmes manœuvres que pour la 2 ème , sauf que c'était vraiment plus dur, puisque nous devions passer cinq siphons. Nous étions la même équipe pour assembler cette plate-forme : Pépé, Henri P., Daniel et moi. Tout c'est passé à merveille, on avait tiré les leçons de notre aventure de trois ans auparavant ! Guy et Bob en attente sur la 1 ère plate-forme, avec des scaphandres et des phares de secours. Sur la 2 ème plate-forme, Marcel et Mickey et, pareil, scaphandres de secours, ventraux de secours et phares de secours. Une bonne liaison téléphonique nous permettait de communiquer avec toutes les plate-forme et jusqu'à l'équipe de soutien resté à l'extérieur de THAÏS.

Ce 6 ème siphon, nous l'avons exploré sous toutes les coutures !! Bien sûr, il y a eu ce fil d'Ariane gravement bloqué dans la roche, à tel point que j'avais du intervenir pour retrouver les copains.

L'ennui pour nous, c'est qu'au fil de nos recherches, sur quelques années, nous ne trouvions pas de solutions, pas de réseau supérieur qui nous aurait permis de déboucher et continuer une exploration en galerie sèche, ou en rivière souterraine. Au contraire, on s'engageait de plus en plus profond dans le 6 ème siphon. Grave, nous avons du abandonner nos recherche, nous en étions à 70 mètres de profondeur ! Derrière 5 siphons, nos moyens de cette époque ne nous permettaient pas d'aller plus loin. Dommage. THAÏS refusait de nous livrer ses secrets !!

Une vue de notre présence dans l'un des siphons de THAÏS. Remarquez le mousqueton qui coulisse sur notre fil d'Ariane fixe. Sans cela, on ne ressortirait jamais d'un endroit comme celui là ! Ici je suis à l'arrière de Pépé.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Emplacement plateforme post s2

 

Première plateforme post s1

Croquis d'installation de la première plateforme. Je pense que cela ce passe de commentaires !!

Iinteface téléphonqieu siphon surface.. Sur cette photo, tout est là, la signalisation, les téléphones, celui qui assure la liaison avec l'extérieur et celui qui permettrait de communiquer avec les plongeurs, s'ils découvrent du nouveau derrière siphon et qui leur aurait permis de déboucher ! Ici, c'est le branle bas de combat. Des plongeurs sont engagés et ça communique à « font la caisse » comme ont dit ! Tout le monde sait ce que les autres font, depuis l'extérieur et aussi depuis l'entrée du premier siphon, en passant par les signaux que les plongeurs envoient. Même si l'erreur zéro n'existe pas, la sécurité est assurée au maximum !

 

Préparation seconde plateforme.
Ici, Henri P., « en civil » Derrière lui, Daniel B. Devant et de face avec un bonnet, c'est « Pépé » Yves et Henri B. en face d'Yves. Ils tiennent l'un de nos « colis » debout. On va bientôt commencer à faire flotter notre charge. En attendant, tout cela est très lourd ! Nous sommes au bord d'une gravière de Miribel-Jonnage, là où j'avais fait mes débuts, mes premières plongées, quelques années avant !!

 

Thais mise à l'eau des charges 1

Thais mise à l'eau des charges 2, Ca ne va pas être facile !!

en route vers le s3

 

Départ du s3

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dans le s2 de thais

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Plongeurs du GRPS longés dans les siphons de thais