Prélèvements biolpéléologiques

 

Par Denis Lorain

 

 

J'avoue que j'avais entendu parler des cavernicoles, ces petites bêtes, plus ou moins grosses, qui vivent dans les grottes, mais je n'en avais jamais vu. Henri B. faisait des travaux d'études, en tant que bénévoles, en relation avec des scientifiques de l'I.N.S.A. (l'institut national de sciences appliquées, de Lyon). Une fin d'après midi, un jour de relâche, je regardais Henri B. préparer des petites boites en fer numérotées. D'autres part, il avait préparé, dans une boite en plastique, de la viande hachée, qu'il avait laissé s'avarier. Bon sang, ça puait son truc !

« Tu fais quoi là Henri ? Ça va te servir à quoi cette viande pourrie ?

•  Demain, je vais déposer cette viande dans la goule de Sauvas !

•  Punaise, ça pue ton truc ! C'est pour quoi faire ?

•  Demain matin j'y vais, viens avec moi, tu verras ! »

Le lendemain, de bonne heure je partais avec Henri, pour la goule de Sauvas, qui se trouvait très proche de notre camp. Henri avait 10 boites numérotés de 1 à 10 !

Il emmenait sa viande pourrie et de quoi prendre note. D'ailleurs, c'est moi qui tenait son bloc-note pour prendre des données, sur ses indications. Nous avions nos casques acétylène pour nous éclairer et nous avons pénétré dans la goule :

« Bon, je vais commencer ici, note que l'on est à 150 mètres de l'entrée et le N°1 pour la boite !

•  Ok Henri ! ça va servir à quoi?

•  On reviendra demain en fin d'après midi, je prélèverais des échantillons de cavernicoles !

•  Ah bon, tu es sûr que tu vas trouver quelque chose ?

•  On revient demain tu verras ! »

Henri disposait de petits tas de viande tous les 30 mètres et me demandait de noter les distances et la numérotation de ses pièges à cavernicoles. Franchement je n'y croyais pas du tout, cela me semblait impossible de trouver des bestioles par ici ! Bien sur, dans la goule, il y avait des crevasses et des « marmites » avec des restant d'eaux stagnantes, mais la position de ces boulettes de viande sur les rochers me laissait perplexe !

Henri disposait son dernier piège, nous étions à 500 mètres de l'entrée. J'avais tout noté, selon ses indications et on est repartis, il était déjà entre 10 et 11 heures du matin.

Le lendemain, vers 18 heures, on entrait dans la goule. Là encore, je tenais le bloc-note pour tout noter et nous avons pénétré dans cette grotte, très torturée, par des mises en charges graves, en période de grosses pluies, ou de gros orages. Ici, ce n'était pas une résurgence, mais l'inverse, l'eau s'engouffrait dans cette grotte, avec une violence extraordinaire !

Henri s'était muni d'un sac dans lequel se trouvaient toute les boites numérotées (elles étaient percées de petits trous pour faire de l'aération). Il avait également une pince, du genre pince à épiler. Nous sommes arrivés vers le premier piège et là, je n'en revenais pas, c'était incroyable, il fallait le voir pour le croire ! Toute une faune s'était attaquée aux petits tas de viande pourrie et tout ce petit monde bouffait très tranquille ! Certaines de ces bestioles ressemblaient à de petites crevettes, d'autres, à des insectes que je n'arrivais pas à classer et puis des trucs du genre scarabées ou cafards ! Je me demandais d'ou toute cette vie sortait !

« Ben dis donc Henri, y'a du monde !!

•  Oui, tu vois je te l'avais dit !

•  Tu procèdes comment ?

•  Je vais prélever un peu de ces cavernicoles, toi tu notes le nombre de bestioles que je prélève et leur couleur.

•  Ok !

•  Tu vas voir, plus on va avancer, ce ne seront pas les mêmes et leurs couleurs vont changer ! »

Henri prélevait quelques types de cavernicoles, représentatifs de ses pièges, un peu de viande et il mettait tout cela dans l'une de ses boites numérotées. Les autres pouvaient continuer leur grande bouffe !

A chaque endroit, je notais tout, avec les indications d'Henri, sur le bloc note où j'avais déjà décrit, la veille, les emplacements des pièges. Ce n'est qu'à mesure de notre parcours, que je pouvais remarquer un changement de cette faune et, évidemment, plus loin de l'entrée, des petites bêtes sans couleur, dépigmentées. Pas de rayon de soleil, donc pas de couleur. On peu dire cela comme ça ! Henri a fait tous ses prélèvements et les a classé dans ses boites.

Plus tard, il remettra cela aux laboratoires scientifiques de l'I.N.S.A. à lyon.

Voilà pourquoi, lorsque l'on achète un livre sur les sciences naturelles, on découvre une forme de vie plus ou moins connue.

On participait, bien modestement, à ces informations scientifiques !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Voici une vue de la progression dans la goule de Sauvas. Henri B. est en position pour franchir ce passage difficile. Tout est équipé, spéléologie oblige, par des cordes et des échelles. Malgré tout, rien n'est simple !

Remarquez cette crevasse pleine d'eau. Il vaut mieux éviter de tomber dedans !