Résurgence de Tantayrou


Commune de La Panouse de Séverac

Coordonnées : X=655,05 Y=229,62 Z=730m

Développement : 3100m dont 2200m de siphon.

Localisation
Coupe Plan
Récit

p penez en 1984 par jean bancillon

 

Situation (d'après Patrick Penez)

A l'ouest de Séverac le château, en direction de Rodez, passer Lapanouse et bifurquer à droite jusqu'au hameau de Tantayrou.
Contourner le village par la droite. 50m avant un transformateur électrique, prendre la piste à droite et remonter le ruisseau jusqu'au bout du chemin (champs fermés par des barrières).
L'entrée souvre sous une barre rocheuse, en tête du cours asséché du ruisseau.

Historique (daprès Bernard Loiseleur)

De façon étonnante, lévent de Tantayrou a mis fort longtemps avant de retenir l'attention des spéléologues. Il nest mentionné ni par Vigarié, ni par Balsan. Cest pourtant la principale émergence karstique du versant sud du Causse de Sévérac. De plus, de l'entrée, dès que le
niveau de l'eau est suffisant, on entend parfaitement le grondement du ruisseau souterrain.
Ce n'est quau mois de septembre 1966 que le Gersam, en la personne de Georges Capus, s'intéressa à cette cavité. Comme la grotte ne figurait pas à linventaire de Balsan, le déblaiement du laminoir d'entrée fut entrepris. Il faut dire quà cette époque, pour les spéléos régionaux,
toute cavité vue par Balsan était considérée comme terminée et raresétaient les investigations complémentaires entreprises.
Mais, donc, à Tantayrou, pas de prestige des anciens pour freiner l'enthousiasme. En deux jours, les difficultés de l'entrée furent derrière les explorateurs. Après le laminoir, il fallut avoir recours à un sommaire élargissement à l'aide du couple marteau-burin pour franchir une étroite diaclase. Celle-ci constituait alors un passage très difficile à surmonter. Il faut dire que le passage était très délicat. Après un virage à la négociation scabreuse, qui se passait sur la tranche, un bras en avant et l'autre le long du corps il fallait se laisser glisser dans le fond de la diaclase et suivre celui-ci sur plusieurs mètres avant de déboucher enfin dans la première salle. Le retour était beaucoup plus difficile puisqu'il fallait cette fois se laisser tomber vers le haut de la diaclase, ce qui est notoirement plus délicat comme manoeuvre.

Quatre cents mètres de galeries tantôt exondées, tantôt occupées par de profonds bassins furent explorées jusqu'à une voûte quasi mouillante.
La seule topographie réalisée jusquà une époque très récente était celle établie par le Gersam. Sa qualité et sa précision laissaient néanmoins à désirer ; les exigences des années 60 étant moins grandes que celles de la fin du siècle.
Au mois de juillet 1969, Roland Pélissier et le Spéléo Club de la MJC de Rodez franchissent cette zone très basse et s'arrêtent devant l'entrée du premier siphon.
A partir de 1970, les étroitures de la diaclase d'entrée passent à létat de souvenirs à la suite des travaux délargissement réalisés par Jacques Pomié. Les premières tentatives de plongée sont le fait du Groupe auvergnat de Recherches souterraines en 1977. Ce premier essai qui permit de progresser d'une centaine de mètres faillit aussi être le dernier pour l'un des plongeurs.
Les plongées sont abandonnées jusqu'à ce que, en 1982, Jacques Pomié, dans le cadre de campagnes de plongées sur les grands Causses, intéresse le plongeur Patrick Penez et les siphonistes du club méridional Spéléo-Ragaïe à l'exploration du, ou plutôt des, siphons de Tantayrou.
Ces plongées, effectuées avec laide du Spéléo Club de la Lozère, sont décrites par Pomié dans l'exposé quil consacra à l'exploration du Sauveterre lors du Symposium millavois sur l'histoire de la spéléologie française de 1988.

Trois plongées ont lieu en 1982 par Penez, en compagnie de Jean-Charles Chouquet le 29 mai, puis les 19 juin et 31 octobre. A l'issue de cette première campagne, 1260 m de siphons,
numérotés de 1 à 6 sont connus, entrecoupés de courts tronçons exondés.
Une deuxième série de plongées a lieu en 1983, les 19 juin, 24 juillet et 1er octobre, à nouveau avec Chouquet. Le siphon terminal de l'année précédente, plongé sur 90 m, est sorti après 130 m. Trois nouveaux siphons sont parcourus sur un total de 920 m. La dernière exploration
est décrite par Penez comme une plongée baston. Les plongeurs sont deux, certes, mais ils ont 11 bouteilles à transporter, dont 4 blocs de 15 l.
Encore, ceux-ci étaient ils gonflés à 300 bars, ce qui n'est pas vraiment la pression de service habituelle des adeptes de la plongée loisir mais donne 30% dair supplémentaire. Le volume emporté frôle ainsi les 35 m3. L'homme de pointe passe 7 h en plongée. De plus les portages dans des galeries argileuses sont difficiles. On comprend mieux ainsi que le réseau noyé n'ait pas été repris de sitôt.
A l'issue de ces deux campagnes, le développement de l'évent de Tantayrou est de 3200 m dont 2170 m de siphons. Il est clair que dépasser ce point n'est plus une entreprise facile et relève du travail d'équipe.
Le seul regret que lon puisse avoir à l'énoncé de ces résultats, aussi remarquables qu'impressionnants, est qu'aucune topo n'ait été rapportée de ces expéditions. Nous n'avons aucune idée de l'orientation générale du réseau ainsi exploré. Ce n'est toutefois guère étonnant si l'on pense aux conditions acrobatiques de ces plongées, restées uniques, et au
considérable Barnum qu'elles supposent de déployer.


Hormis ces travaux, il ne semble pas que la grotte ait connu d'autres recherches. Tout au plus pouvons nous indiquer avoir désobstrué et exploré une galerie supérieure dans la salle fossile au dessus du ruisseau en mars 1994 et avoir également commencé à ouvrir le laminoir bas qui se trouve dans le porche d'entrée sur la droite en novembre 1993.
En 2002, dans le cadre de la réalisation dun mémoire de Brevet d'état de spéléo, Gilles Barthe reprend l'étude et la topographie de la caverne. D'une part, une topographie de qualité est issue de ces travaux et, d'autre part, quelques petites premières sont faites dans la partie exondée.
Si depuis les plongées de Patrick Penez et Jean-Charles Chouquet, aucune exploration denvergure ne paraît avoir eu l'évent pour théâtre, il sert par contre couramment de grotte d'initiation ou de visite pour les professionnels du secteur. On y trouve en effet le spectacle d'un
ruisseau souterrain très pittoresque et le plaisir dy nager en combinaison néoprène jusqu'à l'amorce du siphon 1.

Au dessus de lévent de Tantayrou, la grotte du même nom, quoique vue par le Gersam, n'avait pas fait l'objet d'investigations complémentaires. Nous l'avons sortie de l'oubli en 1994 lorsque nous avons constaté qu'il en sortait par temps chaud un appréciable courant d'air. Nous avons attaqué en 1995 un chantier qui a permis d'avancer de 12 m sans avoir encore dépassé la zone étroite. Cette cavité est fort intéressante en ce quelle représente un évident niveau fossile de
l'actuel évent.
L'histoire du réseau de Tantayrou n'est certainement pas terminée mais elle est réservée aux plongeurs et aux artificiers, à moins que l'on ne finisse par trouver un aven sur le plateau sus-jacent.
Depuis 2005, le Spéléo-Club de la Lozère organise des plongées destinées à reéquiper et topographier la branche active de la cavité : le réseau des siphonistes.

Description (par Frank Vasseur)

205m de jolie rivière souterraine conduisent au lac de 60m qui précède le S.1. Au terme du bief, une arche divise la galerie dans la largeur, créant ainsi un mini-siphon avant qu'un léger coude vers l'ouest amorce le S.1(590m ;-17).

Il débute par 116m d'un conduit large de 2 à 3m pour 4 à 6m de haut. Un point bas ponctuel (-13) précède un cran de descente jusqu'à un carrefour, à 116m de l'entrée(-11) .

Vers le nord, une branche « fossile » émerge à 174m du départ dans une galerie fossile étroite et dédoublée terminée par un autre siphon, exploré sur 75m. Explorations en cours par Romuald Barré.

A l'est, une courte galerie basse semble être un sous-écoulement de la précédente.

Vers l'ouest, après un virage à angle droit, on est dans l'actif.

La galerie, sensiblement plus haute que large, ne fait plus que 2m de large au maximum. Il n'y a plus de sédiments et le courant oppose ici une résistance sensible (mais largement supportable). A 151m, un autre virage, plein nord augure un long tronçon presque rectiligne. A 190m, la galerie devient subitement impénétrable. La suite est en retrait puis en hauteur, via un étage supérieur suivi durant 16m, jusqu'à ce qu'un petit puits ramène au niveau initial aux dimensions toujours modestes. A 293m, un magnifique puits-fracture intime et stratifié, avec un passage à négocier en douceur, remonte dans une galerie plus vaste. Ici s'opère un changement de morphologie, le conduit s'épanche, devient plus confortable. Les voûtes s'élèvent et l'on passe sous une première cloche d'air.

La tendance ascendante se confirme. A 323m une longue cloche, indiquée comme la fin du premier passage noyé par Patrick Penez, se franchit à la nage, sans toucher le sol. Le conduit confortable évolue un tantinet à –4m, surmonté d'une cloche. Un virage vers le nord amorce une descente sur un talus de galets et sable grossier (l= 4m). Un passage bas à –12 puis la descente se prolonge jusqu'à –15, alors que les parois se resserrent. Le sol est recouvert de gros galets noirs et oblongs, enchâssés dans de l'argile et du sable compact. Un point haut ponctuel à –13, puis la fracture plonge à –16. Là s'opère le changement majeur d'orientation. La cavité, jusque-là orientée au nord s'infléchit radicalement à l'est/nord-est.

Un nouveau passage bas sur les galets précède une section beaucoup plus confortable (3 x 3m en moyenne) : la plus profonde de cette partie de la résurgence. Après un parcours dans la zone des –17, à 486m le conduit remonte à –13, s'y stabilise avant d'amorcer une remontée progressive jusqu'à –10.

De là, on émerge en remontant un magnifique méandre noyé, en trois sinuosités denses après 590m de siphon. La durée moyenne pour parcourir ce siphon sinueux est d'une grosse quarantaine de minutes.

Le lac de sortie, profond, baigne une jolie salle axée sur une fracture. En rive droite, un redan subvertical (2m) s'engage dans une modeste galerie exondée fossile

En remontant la rivière, le S.2 est à 50m de là.

La rivière provient d'un canyon (1,8 x 5m) actif, long de 31m, acéré de cisaillantes lames d'érosion et terminé par une escalade sur un bloc coincé. C'est la marchepied pour accéder à la vasque du S.2 (86m ;-7) de 3 x 5m. Ce siphon est confortable (3x3m en moyenne) jusqu'à l'ultime remontée, dans une trémie noyée, affectée d'une étroiture à –4,5 (une dalle massive posée sur le sol), juste avant d'émerger dans une salle d'effondrement.

La vasque de sortie est dominée par un chaos, à escalader via des blocs fracassés(+4m). On prend pied dans une jolie salle (6 x 6m) couronnée de parois à stratification aclinale, dominée par un superbe plafond plat, avant de redescendre sur une jolie galerie (3 x 2m) baignée par un plan d'eau.

Un lac de 42m (profondeur 2m maximum) sinue jusqu'à un joli chaos qui impose quelques pas d'équilibriste, notamment au sommet où la hauteur atteint péniblement 1,7m. Quelques stalactites adoucissent, à la vue, les difficultés auxquelles le corps est soumis.

Le cours de la rivière est ensuite très confortable (3x4m), sur un sol de sable fin, régulier et homogène. C'est la seule progression « reposante » en inter-siphon dans cette cavité.

Subitement, la rivière s'arrête, 104m en amont du S.2. En continuant dans la galerie exondée, on rejoint 25m plus loin un amoncellement rocheux, concrétionné sur la partie supérieure. Un passage en escalade est imposé pour rejoindre le lac en amont.

Ce passage malcommode et inutilement acrobatique se shunte par le S.3 (32m ;-2), qui s'amorce dans une toute petite flaque au terme de la rivière. C'est un siphon réduit (1,6x1,6m) qui émerge dans le lac, en amont du chaos shunté.

Un lac de 18m bute contre un effondrement. On l'escalade par la rive gauche, en grimpant sur un bloc incliné, basculé. Une salle (7 x 4m) ornée d'une coulée stalagmitique en rive droite se prolonge par une progression très accidentée sur des blocs plurimétriques parfois instables et enchevêtrés.

53m après la sortie du S.3, une alcôve concrétionnée annonce le S.4 (40m ;-2). C'est une suite de voûtes mouillantes intimes.

On émerge dans salle (6 x 4m) avec un modeste affluent en rive droite, suivie d'une superbe rivière dardée de lames d'érosion acérées. Au plafond, un lapiaz inversé gris clair est strié de profondes cannelures orthogonales. Splendide !

30m après le S.4, un virage au sud dévoile la vasque du S.5 (192m ;-11). On sinue d'abord à la faveur d'une dominante sud/sud-est dans une galerie confortable. Un virage ramène l'orientation au nord, alors que la section rectangulaire semble découpée à l'emporte-pièce (2 x 4m). Dans la partie terminale, la galerie s'élargit à la faveur d'un talus de sable, affecté d'un rétrécissement en hauteur à –7m.

On retrouve l'air libre dans un chaos rocheux. Une progression hasardeuse sur des rocs permet de traverser la salle, concrétionnée en rive gauche, et qui collecte, via ses voûtes, un modeste écoulement.

L'éboulis vient buter contre la paroi en rive droite. Derrière le chaos, un modeste plan d'eau recèle le S.6 (147m ;-7).

Une pente de sable, remaniée par les crues, glisse régulièrement jusqu'à –7, après une étroiture dans le sable, à négocier à –6. La progression est agréable et régulière, à –6, direction nord-est. Le siphon grimpe graduellement pour retrouver l'air libre dans une jolie vasque, prolongée par une confortable rivière (4 x 4m) à remonter sur 53m.

Au bout de 20m, une voûte mouillante précède une petite salle avec un beau départ de galerie en rive droite, en hauteur. Un autre changement majeur de direction s'opère ici, au bénéfice du sud-est.

Le S.7 (235m ;-6,5) fluctue entre –6 et deux lacs. Une cloche intermédiaire recèle un curieux écoulement permanent, issu d'un pertuis digital en plafond et au centre de la galerie. Une version hypogée de la douche obligatoire ?

Il émerge dans une galerie chaotique (3 x 5m) immédiatement barrée par un effondrement rocheux. Ce chaos contraint à une escalade en rive droite, puis une progression sur une strate avant de retrouver la rivière, puis un lac. 40m après la vasque du S.7, une méduse massive orne la rive droite, annonciatrice d'un nouveau chaos à franchir sur des rocs enchevêtrés. Un nouveau lac (l=2,5m) précède l'avant dernier siphon, situé 89m en amont du S.7.

C'est le terminus actuel de la topographie.

Le S.8 est donné pour 35m.

Une simple cloche d'air le sépare du dernier siphon. Celui-ci développe 780m (-24) et se divise en deux branches.

 

 

 

280m, par Frank Vasseur

 

lucarne à 440m, par Frank Vasseur

sortie du S1, méandre noyé, par Frank Vasseur

sortie du S1, méandre noyé, par Frank Vasseur

380m, par Frank Vasseur

430m, par Frank Vasseur

départ du siphon S1 bis, par Frank Vasseur