La civière subaquatique vu de l'intérieur…

 

Par Michel Ribera
photographies : Catherine Enndewell, copyright S.S.F.


 

Les préparatifs commencent, on me place dans la civière. J'ai mis un cardiomètre afin d'avoir des informations sur ma fréquence cardiaque. Les plongeurs me brêle, les dernières explications pour le changement de masque, et la pression monte. On me met au bord de la vasque, le temps que tout le monde finissent de s'équiper. Cela me parait long.

Le départ est lancé, le masque me laisse peu de visibilité et le petit nuage de touille de la vasque me laisse deviner que la civière avance. La veille, mes oreilles sont passées difficilement, j'espère que cette fois-ci tout rentrera dans l'ordre, auparavant, je me suis lavé les sinus. L'eau redevient claire, et les rognons de silex se succèdent au plafond, de temps à autres, une main apparaît dans mon champ de vision pour me demander si tu vas bien, jusqu'ici tout va bien.

Les oreilles passent, je sens la civière descendre. Aucune info sur la profondeur atteinte, mais bon, tant que Jean-Pierre est derrière moi, tout est ok. Après quelques arrêts, à cause de mes oreilles, je décide de me moucher dans le masque, cela me permettra de mieux les faire passer en profondeur.

Nous arrivons dans le puit, je vois Olivier qui s'est arrêté et nous nous éloignons de lui, tiens changement de procédure… Jean-Pierre et Jean-Michel sont là, toujours les mêmes gants qui me demandent si tu vas bien, pour le moment tout va bien.

Je sens que la civière remonte, bon n'ayant aucune notion du temps, je pense que l'exercice est finit mais je trouve bizarre que l'on m'ait pas prévenu. On retourne le sens de la civière, les oreilles me font mal, je stoppe la progression, l'oreille passe et on est reparti, la civière remonte, encore un petit tour et les pieds repassent devant, la civière redescend.

Malgré la présence de mes deux cerbères, je me sens bien seul, le plafond me lasse. Surtout ne pas stresser, garder le masque quoiqu'il arrive. Je vérifie les détendeurs de secours, et le positionnement de mon masque de secours, tout est là. Les spots de la caméra de Fred me rassurent, à chaque fois qu'il les allume, j'en profite à chaque fois pour lever la tête et je fais le tour de ce que je peux voir, c'est-à-dire pas grand-chose.

Je sens que la civière devient lourde pour mes deux collègues, on descend assez verticalement, encore une oreille qui ne passe pas. Je stoppe la progression, je signale à Jean-Pierre que l'on peu repartir, après un temps de latence, je vois les deux mains croisées par-dessus mon masque, fin d'exercice, ouf !!! Jean-Pierre me fait un signe du pouce pour me signaler qu'il est satisfait. On va me libérer dans très peu de temps, il faudra bien sur s'accommoder des paliers mais bon…

Je sens les blocs, au niveau de mes pieds, traînés à terre. La civière doit être lourde pour ces deux plongeurs surtout à cette profondeur. Un nuage de touille apparaît dans mon champ visuel, et en peu de temps, je ne vois plus rien… Le stress monte, j'ouvre mes bras pour attraper ou toucher quelque chose. Je devine un bloc, celui de Jean-Pierre, je lève mon bras pour toucher le ciel de la cavité et je sens que mes gants râpés sur ce dernier… J'en conclus que mes anges gardiens sont toujours présents et que la civière avance…

La touille disparaît peu à peu et on reprend la galerie qui fait un yoyo, et je stoppe le retour, une oreille qui ne passe pas, et on repart. La touille réapparaît, elle nous a rattrapé, on remonte, un petit puit. Le vêtement étanche commence à se gonfler, et je sens la civière remonter assez rapidement et les purges se mettent à cracher l'air. La civière redescend, et je sens qu'on la rattrape de justesse.

La remontée est longue, le masque devient inconfortable, je commence à ressentir le froid. J'ai l'impression d'avoir les pieds humides. On touche le boîtier de distribution, un nouveau gaz arrive, sûrement le nitrox. Donc d'après le briefing, on doit atteindre la zone -30m. Je ressens une agitation autour de mon lit, le reste de l'équipe me reprend en charge.

Toujours les mêmes rognons de silex, aucun signes au-dessus de mon masque depuis un bon moment lorsqu'une main viens me demander si tout vas bien, je réponds et l'attrape, je regarde l'ordinateur de plongée : 9m… ouf !!! Bientôt dehors… le plus long sera le palier à 6 mètres. La galerie est serrée, à peine un plongeur bouge, je le ressens. Chacun doit sûrement trouver sa place, je sers plus d'accoudoir que de victime, c'est la première fois depuis la remontée que je ne me sens plus seul. Ils sont là tous autour de moi. Les gants sont gonflés et me font mal au niveau des poignets, j'ai une crainte : j'espère que les gants ne vont pas lâcher et remplir le vêtement…

Les minutes s'éternisent, elles deviennent des heures. Je reconnais le gant de Jean-Pierre qui m'indique qu'il me reste plus que 10 min. Je regarde son profondimêtre, 53m, je suis déçu mais il me fait signe que tout est ok pour lui, un léger sourire derrière le détendeur. Après un bon moment, la progression reprend dans une touille, j'aperçois à peine le plafond.

Le miroir de la surface fait son apparition, un seul désire : enlever le masque…

Autour de moi tout le monde s'affaire, chacun trouve sa place… On touche les tuyaux du masque qui tire sur mon visage. Et enfin la délivrance, on l'enlève… De l'air !!!

Les spéléo reprennent la suite sur une tyro après un portage des plus périlleux. On pose la civière, on me libère, je prends mon temps, je m'assoie et attends un peu. Fred viens me serrer la main, ça y est on l'a fait, tout est terminé…

 

Les points forts :

  • Exercice très bien préparé
  • Le cardio indique 81 pulsations de moyenne sur 93 min de plongée… Malgré le stress, je m'attendais à tourner beaucoup plus haut.
  • Je n'ai ressenti aucun stress de la part des plongeurs
  • Malgré les soucis rencontrés lors de la plongée, rien n'à filtré
  • Le masque peut être bougé afin que l'on puisse se moucher pour vider les sinus

Les points à améliorer :

  • Le froid sur la fin de la plongée, mais un gilet chauffant est en préparation
  • Le manque d'information sur le temps et la profondeur atteinte, un timer sera nécessaire sur le poignet de la victime
  • Les gants qui gonfle et qui font mal au niveau du poignet, mais de nouveaux gants ne devraient pas tarder à arriver.

En ce qui concerne le fait pour qu'un non plongeur soit secouru dans cette civière, cela est tout à fait possible. L'équipe est performante et met en confiance la victime. Le seul point délicat, serait le passage des oreilles si la victime est enrhumée. Il faudrait un temps d'adaptation au masque facial.

Je tiens à remercier tous ceux présent lors de cet exercice. Un chose est sûre pour ma part, c'est que je n'aurai pas fait l'exercice sans connaître l'équipe qui m'accompagnait.