Le Ressel

Récit de Jochen Hasenmayer


En 1980, contraint par les eaux troubles après une crue à une visite touristique, je m’étonnais du cul-de-sac rocheux à 900m. Le reste du fil d’Ariane partait dans une galerie latérale avec un courant sensible. Le 22/04/1981, avec un scaphandre de 80 litres sur le dos, je pénétrais dans la continuation.
Les directions générales jusqu’ici (nord et ouest) changeaient maintenant (sud). La galerie reprenait les dimensions du début du siphon. A 1200m, changement de niveau et les 60m de profondeurs sont franchis. C’est seulement au point 1500m qu’un grand puits amène à des profondeurs moindres et à l’ancienne direction. A 1600m, en couplant un nouveau rouleau de fil d’acier inox, j’aperçois au-dessus de moi une cordelette.
J’ai recoupé le point 840m dans la partie déjà connue du siphon. Ici les suisses, apparemment ont perdu la galerie principale et poursuivi dans un shunt. Moi aussi j’ai rencontré cette grande galerie en amont et l’avais suivie, au hasard vers l’aval.
Les petites dunes de sable sur le fond le prouvaient. Pour trouver la bonne bifurcation, le demi-tour était inévitable. Je retournais et
découvrais à 1135m le départ amont vers l’intérieur du causse.

Le 26/04/1981, je vole sur un Aquazepp dans la galerie inconnue direction ouest. Les parois, écartées de 10m au moins, disparaissent
dans une étendue bleu sombre. Le plafond, toujours plat, s’abaisse sous la cote -60.
En-dessous de moi, de 4 à 6m plus bas, défile un plancher de sédiments pétrifiés avec des rives étirées et corrodées. Entre elles, des bancs de sable clair et des replats noirs, incrustés, perforés par les eaux agressives profondes, aux sculptures squelettiques.

A 1400m, une escale : contrôle des équipements et des autonomies. A 1500m, un cul-de-sac, un puits géant avec la forme et la dimension d’une construction de science-fiction. Je m’élève comme un ballon d’enfant. Loin et en-dessous de moi, un fil de nylon de diamètre 1,5mm pend dans le vide. A la hauteur d’une maison de cinq étages, je perds de vue le vaste cirque de murs verticaux.
Je m’aide du spot de 50w de l’Aquazepp : une gorge rocheuse s’ouvre, de 2m sur 4, nue et jeune qui me mène rapidement plus haut. A 1650m, je regagne la cote -40. Je pose l’Aquazepp dans un garage de roche.

A 1700m, j’atteins un virage en serpentin ouvert de 180°. A 1755m (mesuré par le raccourci du shunt), je m’arrête au milieu d’un nouveau puits d’un diamètre de seulement 5m. Profondeur -20m. Ma limite de remontée est déjà dépassée. Les parois verticales remontent à perte de vue et, c’est une impression subjective, peut-être jusqu’à l’air. Demi-tour.


Après 10h15 sous l’eau, j’émerge dans le Célé. La décompression calculée à l’air pour 10 heures a pu être diminuée grâce à l’oxygène à 7 heures. La longueur totale du Ressel est maintenant de 2380m (entièrement immergé) dont 1700m entre -40 et -70.
Pendant la décompression, je trouvais pour la deuxième fois dans la diaclase à -24 des concrétions cristallisées de stalagmites. Avec une autre concrétion cristallisée vue en passant à -50, elles constituent la preuve que la galerie principale, profonde, de la grotte du Ressel est un ancien système d’une grotte avec rivière à écoulement libre.

La diaclase de 350m et les couloirs d’entrée constituent seulement une sortie récente de trop-plein au niveau actuel du Célé.
Il s’ensuit que la vallée du Célé doit être sédimentée sur 50m au moins d’épaisseur ou bien que le vieux système de la grotte s’étendait au moins jusqu’à la vallée du Lot. Ainsi, la question de l’âge des grands couloirs noyés profond conduit à des conséquences géologiques et spéléologiques intéressantes.