Hommage à Vincent Douchet

 

 

 

Paru dans Info-Plongée n°80


VINCENT DOUCHET 1960-1995

"Petit Extrême"

Depuis ce vendredi matin où tu es parti sans même me dire au revoir, je revis tout ce que nous avons partagé : notre enfance - entre le plus âgé et le plus jeune d'une série de quatre frères il existe forcément des liens-, nos ressemblances, ou tes derniers séjours à l'hôpital. Quand, en silence, seuls tes yeux conversaient et me disaient combien tu regrettais d'être là, combien tu déplorais de nous infliger cette épreuve... Imbécile ! comme si tu étais coupable d'être ... mourant. Mais surtout je me remémore nos débuts épiques en spéléo. C'est avec toi que je suis allé sous terre pour la première fois en 1974, en fait je devrais plutôt dire c'est avec toi que je me suis perdu pour la première fois sous terre dans les galeries des carrières de Savonnières (Meuse). Bizarrement nous avons persisté en nous enseignant mutuellement les techniques alpines, en expliquant à l'autre ce que l'un avait entendu ou lu ici et là. Nous avons même poussé le luxe de persévérer cet auto-enseignement avec autant de bonheur, de heurts, de discorde et d'animation en spéléo-plongée qu'en spéléo classique. Mais depuis 1986, ou tu faisais des accidents de décompression à répétition, et en catimini, pour éviter de faire savoir que la brute épaisse" pouvait être terrassé par une petite bulle de rien du tout, tu avais peu à peu abandonné palmes et descendeurs au profit d'une vie plus pantouflarde. A maintes reprises, j'ai bien essayé de reformer avec toi cette paire qui avait si bien écumé les siphons de la Meuse, du Var, de l'Hérault, du Lot et d'ailleurs, mais en vain. Notre dernière exploration commune, c'était en Novembre 1991, au petit Saint Cassien, là où nous avions pris tant de plaisir à découvrir la rivière Amont.

C'est avec beaucoup de recul que j'ai compris que si tu avais raccroché tes palmes, ce n'était pas par goût mais par nécessité médicale.

Aujourd'hui je sais que les "frères Douchet" ne séviront plus dans les siphons et cette idée m'est insupportable. Petit Con, pourquoi as-tu bravé le SIDA, ce défi était perdu d'avance.

Marc DOUCHET