Le Gouffre de la Fosse Cormont
Extrait du bulletin du Spéleo Club Aubois L'échelle No 20
par Philippe Radet
Le gouffre de la Fosse Cormont mérite d'être signalé à plus d'un titre. Tout d'abord, l'entonnoir, dissimulé derrière un épais bosquet, constitue un spectacle inattendu et saisissant lorsqu'il se met à vomir un flot puissant et boueux de couleur jaunâtre dépassant allègrement le mètre cube-seconde à la suite de fortes pluies ou d'orages.
Par ailleurs, il s'agit de la seule cavité de l'Aube ou les galeries noyées ont été explorées ( les explorations toutes récentes restent encore modestes.
Enfin ce gouffre constitue un regard sur un réseau souterrain noyé d'importance dont le fonctionnement hydrologique demeure originale et complexe.
Le récit par Arnold Haid avril 1993.
Aujourd'hui, mercredi 14 avril 1993, le gouffre n'as pas cet
aspect de flot puissant et boueux tel que je l'ai connu.
Cela fait plusieurs mois que je pense reprendre l'exploration de la Fosse
Cormont. Didier Finot et Claude Fournier veulent m'accompagner par curiosité
pour la Fosse et m'assister en surface.
Les précipitations n'étant pas exceptionnelles en ce mois
d'avril, je retrouve le niveau de la nappe d'eau 7 mètres plus bas,
mais le porche d'entée n'est pas visible. La descente au fond de
l'entonnoir s'effectue à l'aide d'une corde car la pente est glissante
et mes bouteilles (2x10l) sur le dos précipitent ma descente. Didier
et Claude me passent le matériel complémentaire, nécessaire
à l'exploration : éclairages, palmes, casque
Je dois retirer les branchages accumulés sur et dans
l'eau si je veux progresser jusqu'au porche que l'on devine. L'eau n 'est
pas très claire et devient rapidement opaque car je patauge sur le
fond boueux pour aller jusqu'au porche ; j'ai le privilège de connaître
un peu l'endroit si j'ose dire.
La barre rocheuse fait environ 1 mètre de hauteur et laisse sous
elle un passage d'autant pour 2 ou 3 mètres de large, ce qui me permet
d'arriver assez rapidement dans la salle noyée aux dimensions de
3x3m. A l'aveuglette je touche les parois en me dirigeant vers le fond et
je retrouve le laminoir entrevu en 1989(date de mes premières explorations
a cet endroit.
Etant donné que je ne suis pas la pour faire des confitures et malgré
une appréhension constante, j'entame une séance de désobstruction.
Le laminoir mesure 2 mètres de large et j'attaque un endroit bien
précis. Je passe des minutes à déplacer des cailloux
gros et petits confondus et petit à petit, je passe les jambes, les
hanches, je me tortille, j'hésite, fais de la place avec mon corps.
Je déplace encore un gros caillou (30x20cm)et me laisse glisser doucement
de l'autre coté.
Je suis maintenant dans une galerie mesurant 70cm de haut
pour 2m de large. Je n'ose pas croire que cela continue et pourtant, je
prends soin avec mille précautions d'attacher mon fil d'Ariane là
où je suis passé et je déroule : 5m. Ma joie est de
courte durée car de nouveau se présente à moi une étroiture
ou je peux passer les jambes avec seulement un battement de 30cm. La pente
est alors beaucoup plus importante (45°) et j'ai l'impression que la
voûte plonge littéralement. La visibilité devient encore
meilleure (50cm. Je constate un léger courant à l'aide de
particules en suspension qui passent devant mon masque.
Je suis très excité et recommence à désobstrué.
Le sol est constitué de galet set j'essaie de les déplacer
sur les cotés. Cela représente un travail important. L'espace
très restreint ne permet guère un travail aisé et derrière,
le plafond n'a pas l'air de se relever.
J'ai passé 40mn sous l'eau lorsque j'attache mon fil avant de rebrousser chemin à 5m de profondeur. Je suis satisfait et déçu à la fois car l'étroiture est très rapprochée mais la désobstruction ne fait que commencer.
Le 27 mai 1995 J.M LEBEL force l'étroiture après désobstruction, ce qui lui permet de progresser de 10m dans une galerie de 3 x 0.40m (à poursuivre avec un plongeur mince avec des petites bouteilles bien gonflées ; cf Info-Plongée No 70.