Résurgence du Gour de Bouclans

2005


par Fred Martin


Fred Martin

 

L'idée m'est venue d'aller revoir le terminus de cette source lors d'un exercice secours que j'avais organisé dans les premiers siphons. De plus Pascal Reilé m'avait dit que les étroitures du fond étaient certainement franchissables.

Les mois de février et mars sont consacrés à la connaissance du site, au rééquipement des siphons et divers portages de sécurité et de bouffe/boisson.

Dès le début la source nous montre ses difficultés mais rien pour autant qui ne soit infaisable.

Le samedi 2 avril nous nous retrouvons en comité restreint pour essayer de franchir le terminus. Thomas Parnet est venu de Port Leysné, Maxime de Giampetro et Margrit Hol de Suisse et Sylvain et moi-même du GSD.

C'est à 10h30 que je me mets à l'eau, Thomas est parti il y a un quart d'heure pour préparer la zone. Il a ré ouvert l'étroiture d'entrée et convoyé son matos jusqu'au S2, pour nous aider à franchir la cascadelle avec les RS. Margrit l'a suivi de près, pour sa part, elle devait déposer 2X4 litres devant le S4 afin de franchir ce dernier plus aisément.

Lorsque j'arrive sous le porche, c'est avec soulagement que je vois qu'il ne faudra pas décapeler dès l'entrée, en me faufilant à reculons ça passe et c'est tant mieux. Le S1 est franchi en compagnie des truites et brochets qui nous rendent visite. Le temps de conditionner le RS et nous franchissons le laminoir avec Thomas, une attention particulière est apportée aux tuyaux annelés, en percer un serait l'échec de la plongée. Je me dirige alors vers le S2. Habituellement je franchis cet obstacle de façon quelque peu folklorique, les blocs sur une bretelle, le masque ajusté sous l'eau ! Mais là, c'est différent avec les recycleurs il faut qu'ils soient bien ajustés près du corps et à la bonne hauteur, je prends donc le temps nécessaire.
A la suite du siphon je retrouve Margrit qui m'aide à franchir les 10 mètres de laminoir précédant le S4 que je franchis grâce à l'une des 4l la redondance étant assurée par le bail out du RS. Ouf, j'en ai fini de la 1er zone étroite, je dois maintenant attendre Sylvain qui est parti un peu après moi pour qu'il n'y ai pas de « bouchon dans les laminoirs ». Je les entends discuter, la liaison entre les 2 siphons doit être réalisable, j'ai ma petite idée mais pas pour aujourd'hui.

Sylvain sort à son tour du S4 il me parle de « l' intimité » du passage. Nous nous dirigeons alors vers le S5 à 3 (Sylvain, Thomas et moi). Tantôt debout entre les blocs, tantôt à 4 pattes ou à plat ventre dans les zones basses . Le siphon 5 , 70 mètres de galerie sans problème. A sa sortie, nous partons immédiatement dans le S6, la vision est superbe, la cavité commence ici à prendre sa dimension, nous naviguons tous les 3 ensembles, nous sommes assez près pour tous bénéficier de ces belles visions et de l'eau claire. Dans la voûte magnifique, nous trouvons quelques cloches. La pente annonce la fin du siphon et la sortie à l'air, la diaclase nous amène à l'entrée du S6bis.

Dans le lac, j'explique à mes deux compères la boucle que j'ai réalisée dans le secteur la semaine précédente. Thomas et Sylvain se chargent d'un relais que nous mènerons plus loin pour assurer la sécurité de la suite. Le S6 bis ne mesure que 50 mètres, c'est sur la fin une galerie en lentille de forme très pure, une fois de plus nous émergeons dans une diaclase, suit un rapide qu'il faut franchir à plat ventre, puis une galerie basse et une cascade. Cette zone est très jolie mais nous oblige une fois de plus à des manips délicates avec nos appareils. Nous arrivons au carrefour et prenons plein Sud vers le S7, à sa sortie dans la baignoire Thomas dépose le relais qu'il possède et nous continuons vers le fond. Voûtes basses, S8,S9,S10 tout s'enchaîne assez rapidement dans cette zone, c'est tant mieux. Thomas stoppe ici sa progression, comme le lieu est un peu hostile, il doit faire demi tour et nous attend au S9, sur une petite plage, il restera 4h00 seul à nous attendre.

Je continue avec Sylvain en direction du S11. Ce siphon est vraiment magnifique. Une voûte majestueuse ouvre sur une galerie en conduite forcée d'une réelle beauté. Nous suivons avec plaisir le fil de nos prédécesseurs, la galerie est lisse et les points d'attache sont rares. Le fil cassé nous oblige à rééquiper une partie du conduit mais dans ces lieux c'est un réel plaisir, le recycleur donne ici toute sa mesure, le temps sous l'eau n'a plus qu'un rôle secondaire. Nous retrouvons le fil en bon état, lions quelques boucles dangereuses et continuons tranquillement, nous découvrons avec Sylvain les joies de l'explo en binôme nous qui y étions assez farouchement opposée, mais dans de l'eau claire nous commençons à changer d'avis. A 250 m du départ nous trouvons les blocs effondrés qui laissent encore une bonne marge de manœuvre. La sortie se fait au dépend d'une diaclase. Nous voilà enfin devant les galeries « difficilement pénétrables » cela fait environ 3h00 que nous sommes partis.

Nous posons tout notre attirail et partons faire une reconnaissance. Vu le profil des galeries, je comprends assez vite le fonctionnement et dit à Sylvain qu'il doit y avoir d'autres siphons. La petite rotonde où s'arrête la topo, la galerie continue en méandre, je m'y lance, 25 mètres plus loi un lac permet de faire chuter la température dans le néoprène, puis 10 mètres de plus et une piscine en bout de méandre, un S12 très clair. Sylvain me rejoint et y fait une visite en apnée. Vient le moment de l'hésitation, que fait-on ? Soit revenir plus tard avec de petites bouteilles, soit tenter de faire franchir la zone au recycleur afin de plonger la suite. Nous sommes là, à 2, en forme, allez on tente. Nous franchissons la zone à nouveau pour aller chercher le matos, je me rééquipe et prends tous le nécessaire et c'est parti. 40 minutes ,40 mètres 1,2,3, yes ! 50 cm de mieux ! On rampe, se replace, Sylvain ne se demande plus pourquoi je voulais que le RS3 soit indestructible. C'est épuisant, « nous transgoutons à grosses spires », nous nous arrêtons régulièrement pour reprendre notre souffle, mais la vasque est bientôt là.

Pendant que j'attache mon fil d'Ariane, Sylvain procède aux vérifications sur le recycleur, étanchéité puis le couple injection / fuite, tout est dans l'ordre, je peux me laisser couler dans le siphon 12. A la base d'un petit puits, je retrouve la profondeur du S11, -5 mètres, cependant je ne trouve pas la suite, plein sud il n'y a rien, je laisse le bobinot en place et reviens sur mes pas pour être sûr de n'avoir rien raté dès le départ, mais rien, je retourne donc à ma bobine. J'ai le temps pour rechercher le recycleur est un appareil fabuleux, il me reste environ 10h00 d'autonomie en gaz, je peux chercher !!!!!!!! Mais rapidement, dans une direction Nord Ouest je trouve la suite, à l'occasion d'un beau cheminement je reprends la direction du sud, au bout de 50 mètres, je rencontre un carrefour que je garde pour le retour et continue plein sud, le siphon est beau et je me sens devenir plongeur, alors qu'habituellement je cherche à sortir de l'eau pour courir dans les galeries, avec les RS3 et les manos qui ne bougent plus je m'imagine rester sous l'eau longtemps, seulement je suis en humide, le bobinot tire à sa fin et le miroir me ramène à la raison ! 100 mètres de siphon sans bulle, ma première découverte en recycleur.

Délicatement je pose les blocs et commence avec joie l'explo de cette nouvelle galerie. A partir de cette vasque j'explorerai environ 300m de galeries orientées N/S. J'arrête ma progression lorsqu'elle devient trop pénible sur des galeries basses et boueuses sur un puits noyé, où alors sur une diaclase se terminant sur un siphon étroit que l'on doit atteindre en quittant le casque. Il est temps de rentrer, au retour je vais jeter un œil dans la galerie entrevue à l'aller, mon bobinot y jette ses derniers mètres, je le vide jusqu'aux derniers centimètres, continuer sur mon bobinot de secours ne serait pas raisonnable, aller on verra pour la suite, mais cela continue dans le croisement d'une diaclase…J'ai parcouru 30 mètres, je reviens lentement pour me ressourcer avant la « galerie des genoux pétés ». J'émerge, Sylvain commençait à trouver le temps long, il est temps de rentrer, le transport est bien sur fatiguant, mais nous nous remettons à l'eau dans le beau S11 pour un retour tranquille la tête dans le guidon, je suis Sylvain qui ouvre la voie. S10, S9, nous retrouvons Thomas un peu frigorifié et c'est à trois que nous regagnons la sortie chargé des blocs prévu en cas de pépin (c'est ma première explo en RS3), les bouteilles de coca sur la cuisse nous nous retrouvons devant l'étroiture du S1, je me déleste de mes 4x4l puis franchit la voûte, Je sors de l'eau à 19h30, heureux, heureux, je regarde Sylvain et Thomas ils sourient : quel esprit anime cette équipe ?

Margrit nous prépare de vrais sandwichs Franc comtois, Maxime ouvre une bouteille de Châteauneuf ! Avec Sylvain nous regardons nos genoux et nous rions !

La suite existe mais elle demandera quelques efforts supplémentaires.
Les enseignements que je tire de cette expérience :

  • Les RS3 sont fiables, robustes, parfaitement adaptés au fond de trou et multi siphons, quelques améliorations se dessinent encore dans nos têtes.
  • Le temps d'équipement en recycleur devant chaque siphon est un élément à prendre en compte pour la durée d'une explo,
  • La nécessité après chaque portage fastidieux, de prendre le temps nécessaire pour effectuer les vérifications de base des appareils.

Remerciements :

Thomas PARNET (le sourire de l'aventure)

Maxime de Gianpetro (la sagesse du groupe)

Magrit Hol (et pas seulement pour les sandwichs !)

Sylvain REDOUTEY (Mister RS)

La boucle de l'anonyme

Le 26 mars 2005, lors d'un portage au-delà du siphon 6 avec Thomas Parnet, je me dirige vers le S7, je sais qu'au croisement après le S6, il faut prendre la galerie la plus à droite. Nous nous y engageons donc, le portage est fastidieux avec un bi 9l et un relais de 4l. J'arrive enfin au siphon que j'avais déjà reconnu. La zone est un peu hostile, je m'enfonce dans la boue jusqu'aux genoux et trouve cela bizarre, mais bon, la suite est derrière ce petit siphon.

Sa longueur est d'environ 10 mètres comme convenu, la galerie qui fait suite est éprouvante, le sol est incliné, je suis dans l'eau, mais surtout dans la boue, je peine a avancer.

Cependant, j'arrive sur un lac dans lequel sans équilibrage j'ai du mal à me maintenir à la surface, mais quelle n'est pas ma surprise de retrouver les blocs laissés là en dépôt de sécurité. Je suis revenu dans le lac entre S6 et S6bis. Je comprend que j'ai fait une boucle qui n'apparaissait pas sur la topo, l'un de mes détendeurs me donne autant d'eau que d'air mais il faut que j'aille chercher Thomas qui m'attend à l'entrée du S7c, plongé par je ne sais qui, la boucle sera donc la boucle de l'anonyme !